Au commencement des îles Australes, un couple habitait l’île Oronuiova. De leur union étaient nés cinq enfants : cinq beaux garçons très forts. Ces enfants perdirent leur père et se retrouvèrent seuls avec leur mère. Un jour, l’aîné décida avec ses quatre autres frères de partir à la recherche de nouvelles terres et laissa leur mère seule dans le pays.
Partis depuis longtemps la mère aperçut, par une belle journée, une pirogue portant un passager. Elle s’approcha du récif et reconnut ce dernier en la personne d’un guerrier. Elle rejoignit aussitôt le rivage et chercha le moyen d’éloigner ce guerrier de son île héritage de ses fils. C’était une très belle femme à longue chevelure noire et abondante.
Ses cheveux comme arme
Après avoir réfléchi, elle trouva l’arme en ses cheveux. Elle décida de s’approcher du guerrier par le récif en changeant constamment de coiffure.
De sa chevelure, elle fit un gros chignon à la droite de sa tête et alla devant la passe Hiava où elle attendit l’entrée du visiteur. Ce dernier en apercevant l’habitante continua sa route vers le sud de l’île. Notre héros, voyant la réussite de son idée, courut le long de la plage et se rendit sur l’îlot. Elle se cacha pour observer l’ennemi. Le visiteur tenta de s’arrêter devant l’îlot car c’est un endroit bien abrité pour se réfugier et passer inaperçu des habitants de l’île. Il descendit de sa pirogue et essaya de la tirer dans le lagon. Aussitôt terminé, il jeta un regard sur l’ilot.
Vahine vers 1910. Photo G. Sage
A la grande surprise de notre guerrier, il vit une autre personne ayant, une belle coiffure sur la tête qui l’observait du sommet d’un rocher. Il rebroussa chemin et continua sa route au large de l’île en essayant de repérer un coin favorable à son escale, tout au moins sans âme vivante.
Une seconde tentative de débarquement
Le guerrier longea le récif vers l’Ouest et trouva un lieu sûr du coté des rochers. Il tenta encore de débarquer au rivage mais que vit-il sur une hauteur de la falaises une personne coiffée autrement que la précédente. Décidément, se dit notre guerrier, cette île est peuplée. Il n’y a aucun coin où je puisse descendre sans que l’on m’observe de la terre. Il avait soif et la fatigue commençait à le gagner. Des jours et des nuits il avait veillé pour voir enfin une terre.
Une île sous la surveillance d’un grand guerrier
Voyant qu’il arrivait à son point d’arrivée en s’approchant de l’île, il essaya une dernière fois de passer le récif par une petite passe qui se trouvait au-devant de sa pirogue. Il s’arrêta et tira sa pirogue. Brusquement il entendit des hurlements, des cris répétés qui n’avaient pas de fin. Il jeta le regard sur la falaise et une personne les cheveux épars, qui gesticulait, lui faisait des signaux en poussant des cris. Il crut à un cri de guerre et il hâta le pas vers sa pirogue perchée sur le récif, la tira fortement vers le large.
La Veuve poussa un soupir de soulagement en pensant que l’ennemi ne se hasardera plus d’entrer dans le lagon. Hélas ! le guerrier essaya une dernière fois parce qu’il avait soif du coté nord-est, la même personne était debout sur un rocher dans la passe et qui l’observait en tenant une gaule à la main. L’ennemi croyant à faire au grand guerrier de l’île s’éloigna de cette terre surpeuplée dont il ne pourra jamais conquérir.
Rimatara Ite Rouru Tahope
La mère conta son aventure à ses fils dès leur arrivée. A partir de cette aventure héroïque, ses fils l’appelèrent : Te Vahine Rouru Tahope. Pour avoir sauvé son héritage, la veuve s’était coiffée de plusieurs façons pour tromper l’ennemi d’où l’appellation : Rimatara Ite Rouru Tahope.
Sources :
Diana Lenoir, école de Amaru à Rimatara, 1977