Témoignage d’un passé que l’on pourrait qualifier de « colonial », cette magnifique demeure en face de l’Assemblée de Polynésie, à Papeete appartenait autrefois à la reine Marau.
En 1844, Ariitaimai et son époux Alexandre Salmon s’installent sur cette terre dite Papeete, offerte par la reine Pomare IV à sa cousine. Une première maison y est construite. En 1899, elle est dans un tel état de délabrement que la reine Marau, fille des époux Salmon, se décide à en faire construire une nouvelle.
La princesse Takau, fille de la reine Marau décrit ainsi la maison :
» Ma mère vivait à Papeete, dans une grande maison de bois qu’elle avait fait bâtir, d’après ses propres plans, par un charpentier tahitien. On avait dû la couvrir avec des tôles ondulées. Les toits de pandanus n’étaient plus alors autorisés à Papeete, par suite du danger d’incendie. C’est bien dommage car ces feuilles de Pandanus entretenaient la fraîcheur à l’intérieur des habitations.
Cette maison, située sur l’ancien «Broom road» entre le Palais Pomare et la mer, remplaçait la demeure bâtie à la chaux et couverte de feuillage qu’avait longtemps habitée ariimatai (la mère de la reine Marau).
La maison était très spacieuse, avec deux larges vérandas à ses extrémités, l’une en face de l’ancien palais, l’autre face à la mer. Elle était entourée d’arbustes aux couleurs chaudes, de plantations de tiare et de jasmin qui l’enveloppaient de leur doux parfum. Ces vérandas vous mettaient à l’abri de la réverbération et de la chaleur, de sorte que l’on vivait très peu dans les chambres. C’est face à la mer que ma mère se tenait le plus souvent ; c’est là qu’elle recevait ses intimes, tandis que le grand salon aux murs couverts de portraits de famille et meublé avec ce qu’elle avait pu sauver en rachetant une partie du mobilier du palais lorsqu’il fut vendu aux enchères, ne servait que pour recevoir les visiteurs de marque. Face au salon, il y avait la grande salle à manger en continuation de la véranda, à droite de laquelle se trouvait une autre salle à manger plus petite ; ouverte sur le jardin ; de l’autre côté une petite véranda qui donnait accès au jardin et par laquelle on pénétrait là où se tenait le plus souvent ma mère »
Plusieurs tentatives ont été lancées pour protéger cette maison.
En 1971, Rudy Bambridge a lancé une pétition pour la sauvegarde de la maison de la reine avec l’appui de nombreuses personnalités du monde de l’art, locales métropolitaines et américaines.
Plus récemment, un projet de classement de la maison a été proposé à la commission des monuments naturels et des sites, mais le dossier est resté sans suite, les propriétaires demandant un prix exorbitant.
Sources :
Mémoires de la reine Marau, dernière reine de Tahiti, Paris, Société des Océanistes, n°27, 1971
Joany Hapaitahaa 2008
Archives Bambridge