Hai Puka vivait dans la mer, dans l’immense baie de la vallée de Puamau, sur l’île de Hiva Oa. Il ressemblait à la fois à un homme et à un poisson et était quelqu’un de gentil. Il ne sortait jamais de l’océan.
La seule dans le village de Puamau qui connaissait son histoire était la plus vieille prêtresse de l’île, Taua Vehine Teumomo, mais elle n’en avait jamais parlé car elle avait toujours su qu’un jour elle aurait besoin de l’aide de Hai Puka.
Or, ce jour était venu.
Hai Puka, sauve l’enfant !
Taua Vehine Teumomo avait une très belle fille que tout le monde appelait Kua. Elle était tombée amoureuse du chef de cette vallée et avait eu un enfant de lui. On l’appela Teiki Ehee Tai. Ils devaient se marier, mais malheureusement, une guerre éclata et le grand chef Teiki fut tué lors des combats. Kua était restée inconsolable.
La vieille Taua Vehine Teumomo ne disait rien, mais le nom de son petit-fils la rendait cette fois sûre qu’un jour elle aurait besoin de Hai Puka. Et ce jour était arrivé car, le matin même, Kahu, le chef des guerriers de la vallée voisine, était venu demander en mariage la belle Kua. Et la jeune femme si fière avait refusé. Elle avait déclaré que, tant que son fils serait là, elle ne penserait qu’au père de son enfant.
Durant la nuit, Kahu s’empara de son garçon. Il le jeta dans l’océan.
Le lendemain matin, alors que Kua cherchait en pleurant son fils dans toutes les maisons de la vallée, la vieille avait déjà tout compris et courut vers la plage puis commença à crier : Hai Puka, Hai Puka ! Elle appela longtemps. La mer se mit à monter et une vague déposa sur la plage l’homme-poisson.
Taua Vehine Teumomo lui dit simplement : Va à la pointe Kiukiu, un enfant est en route vers le havaiki, il faut que tu le ramènes ici. Après, je te dirai tes origines et je te donnerai une mère, une femme et un fils. Fais vite !
Alors, il nagea aussi vite qu’il put vers la pointe ouest de l’île et trouva l’enfant qui dérivait, porté par les courants en direction du havaiki. Il le ramena jusqu’à Puamau. Sur la plage, Taua Vehine Teumomo n’avait pas bougé. Kua l’avait rejointe, elle se tenait à ses côtés, en sanglots. Hai Puka sortit de l’eau en tenant l’enfant à bout de bras. Kua se précipita pour récupérer son fils puis, en découvrant la laideur de l’homme poisson, elle s’enfuit en courant.
L’homme poisson se transforme en beau jeune homme
Taua Vehine Teumomo emmena l’homme poisson non loin de chez elle, juste à côté de la rivière, et lui ordonna de creuser un trou profond et d’y allumer un grand feu. Puis il fallut couvrir ce feu de pierres et attendre qu’elles blanchissent sous la chaleur. L’eau s’est mise à fumer, Taua Vehine Teumomo y jeta des herbes, des feuilles et des fleurs, et demanda à Hai Puka de s’allonger dans ce bain bouillant. Au fur et à mesure, il sentait fondre le corail qui le couvrait, les algues qui s’entrecroisaient se détacher, et les coquillages se décrocher.
Quand la vasque refroidit, un beau jeune homme se releva avec un magnifique sourire. Kua, qui avait suivi toute la scène cachée dans les feuillages, s’approcha, tenant son fils dans les bras. Elle ne dit rien et se précipita vers Hai Puka.
La vieille prêtresse ajouta : mon fils, tu as aujourd’hui une mère, une femme et un enfant. A toi d’en prendre soin ! Pour la première fois de sa vie, Hai Puka comprit qu’il ne serait jamais plus un homme-poisson et qu’il allait enfin être heureux.