L’ancienne église du village de Tapuarava, aurait été construite sur le marae Poureva. L’église nouvelle, construite en 1970, est implantée au même endroit, avec toutefois une différence d’orientation dans son ouverture, l’ancienne était orientée à l’ouest, la nouvelle vers le sud-ouest.

Sur la vue de l’ancienne église de Reao, prise un dimanche de juin 1967, lors d’une sortie de messe, on aperçoit sur la gauche un petit portique de deux mètres de hauteur, surmonté d’une modeste toiture végétale. Accrochées au haut de ce portique se trouvaient deux cloches, l’une assez petite qui appartenait au clergé, à gauche, la seconde un peu plus importante, à droite qui pouvait bien faire quarante centimètres de hauteur était une cloche marine qui provenait de l’épave d’un navire. Comme cette dernière avait un volume sonore beaucoup plus important et un meilleur timbre que sa compagne de gauche, c’est de celle-ci que se servait Tetuanui Moearo, le catéchiste, pour appeler les fidèles aux nombreuses prières et avant de donner les directives du tavana (maire) après la messe du dimanche, les corvées diverses de balayage ou d’arrachage d’herbe dans le cimetière ou ramassage des crottes de chiens dans les rues.

Cette belle cloche provenait donc d’un navire qui s’était un jour brisé sur les récifs de Reao, et sur sa panse on y lisait : SAVERNAKE LIVERPOOL.

Les missionnaires de Picpus ont décrit cet accident :

 » Le 14 novembre 1901, un navire anglais, le Savernake se brise sur les récifs de Reao. Les naufragés, terrifiés à la pensée de tomber entre les mains d’anthropophages, se hâtent sur des canots de gagner la haute mer. Crainte injustifiée puisque les insulaires les invitent cordialement à venir. Mais comment se faire comprendre ? Une belle inspiration traverse l’esprit du chef. Il court chercher le drapeau français dont il a la garde et il l’arbore au sommet d’un cocotier. A cette vue, les marins anglais se reprennent : « si la France est là, il n’y a rien à craindre ! » Et ils virent de bord vers ce peuple qui leur donne des marques de la plus haute sympathie, au point de se priver même de nourriture pour assurer pendant deux mois la subsistance des infortunés voyageurs. Ces derniers tombent sous le charme des indigènes dont les femmes sont chastes et la conduite exemplaire. Le Président de la République, informé par les marins, heureux témoins de ces merveilles de dignité et de charité chrétienne, envoie pour les chefs cinq médailles de sauvetage. »

Le récit des missionnaires, un peu enjolivé ne nous dit pas s’il y avait une tempête quand ce navire de commerce s’est mis au sec. il y avait quelque chose comme une dépression tropicale ou un cyclone. En effet, au mois de novembre nous sommes en pleine saison où se forment ces phénomènes ; de plus le bateau dont les tôles sont toujours là, environ à un kilomètre à l’ouest du village se trouve parmi les cocotiers, enfoui dans les cailloutis apportés par la mer. Il ne serait pas rentré tant à l’intérieur de l’atoll par niveau normal des eaux. Il avait donc une montée des eaux importantes comme il s’en produit dans un cyclone par exemple.

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Sources :

André Pilon, 05/09/2001, La cloche du Savernake
École Tapuarava de Reao, 16 juin 2000
Recueil, La congrégation des pères des Sacrés-Cœurs dite de Picpus, 1908

Photo 1 : André Pilon  (photo de juin 1967)
Photo 2 : Savernake,an Iron Barque built in 1869 by Richardson Duck & Co, Stockton. In 1883 she was owned by J Owens, Liverpool and in 1897 owned by R Hodgens, Liverpool.