Dans l’esprit de nombreuses grandes familles maôhi de Tahiti, le chien Piihoro reste l’un des plus grands gardiens-protecteurs (Tâura).
Une légende, veut que par certaines nuits de pleine lune, on entend près du marae Utuaimahurau Narii, à Paea, comme un chien tirant la langue en haletant. Evidemment, il est à bout de souffle, il poursuit ou est poursuivit et il court, d’où son nom de Piihoro.
Piihoro, un târua (gardien protecteur)
Le chien Piihoro, un énorme chien noir avec trois taches blanches, reste l’un des plus grands protecteurs (Taura) de la famille des Teva et de ses descendants.
Plusieurs membres de cette famille ont raconté que plus d’une fois surtout lors de sorties nocturnes, ce chien les a protégé de dangers graves. A ces moments là, Piihoro apparaissait d’abord d’une taille normale puis prenait des proportions gigantesques. Il leur barrait la route et les obligeait a rentrer chez eux. On peut le voir quelquefois à Arue ou à l’entrée de Faa’a.
L’histoire du chien Piihoro
Varuatemehara, Grand Prêtre de Paea, avait épousé une guerrière du nom de Patiti, qui était originaire de la vallée de Orofero à Paea.
Cette Dame, d’une grande beauté, était malheureusement peu sociable. Son mari était très épris d’elle, mais lorsqu’elle se mettait en colère, sa férocité était telle que pour la calmer, il était obligé de lui infliger des coups, jusqu’à évanouissement. C’est pour cette raison qu’il la surnomma “Patiti” (frapper par des coups de poings).
Cette femme ravissante, au caractère foudroyant éleva un jour un chien. L’animal avait le même tempérament que sa maîtresse. Elle dressa la bête en ayant à la main un gourdin ou un “faniu haari” (pétiole de feuille de cocotier). La bête apprit à lui obéir. Au moindre appel, le chien accourait. Elle lui donna le nom de : “Piihoro”. Pii horo-mai, signifie « quand je t’appelle, cours vers moi ».
D’après la légende, le chien avait une fourrure noire sur laquelle se trouvaient trois taches blanches. D’autres, témoignent qu’il était de couleur grise.
Le marae du chien Piihoro
Cette femme, au caractère dur et insensible, eut beaucoup de peine à la mort de son chien. Patiti fit construire un marae non loin de la plage de Paea. Elle mit le chien sur le ahu, puis plaça trois énormes pierres : une à l’arrière, et les deux autres à quelques mètres vers l’avant du marae, alignées de chaque côté. Elle donna au marae le nom de Piihoro.
Une fois le marae construit, pendant la cérémonie, Patiti dit à son chien :
Tu n’es pas mort, tu vivras pour moi et par mes descendants. Voici le pacte que je fais avec toi et qui durera toujours : quand la troisième lune passera (po toru), tu seras aussi grand que les nuages du ciel ; tes yeux seront comme des éclairs ; ta puissance sera énorme. Mais en retour de la vie que je te donne, tu protégeras et aideras mes descendants. Quand quelqu’un t’appellera, tu sortiras de ton monde pour lui venir en aide.
Cette alliance restera vivante tant que la famille se rappellera ton nom et la manière de t’invoquer. Les trois pierres que j’ai placées l’une à l’arrière du marae, et les deux autres de chaque côté, sont les gardiennes de ton territoire. Elles ont le pouvoir de repousser toutes les attaques pouvant nuire à ton existence. Elles possèdent aussi la force de communiquer avec les autres marae de famille, en passant naturellement par le “unu” qui se trouve sur le marae.
Voici les noms de ces trois pierres qui sont les gardiennes des descendants (Taura no te mau tupuna) :
- la première : “Piihoro”
- la deuxième : “Te Firifiri”
- et la troisième : “Te Rarama”
Sources :
Charles Teriiteanuanua Manu-Tahi. Contes et légendes de Polynésie. 1983.
Photos : 1 DebinSD, 2 et 4 Tahiti Heritage, 3 Dessin de Sarahina