Dans les années 1940, Maua’e, un homme d’une cinquantaine d’années, habitait sur la presqu’ile de Tahiti à l’entrée de Tautira. Sa vie était paisible, rythmée aux allers et retours entre Tautira et Papeete qu’il effectuait au volant de son truck. Chaque soir il rejoignait sa femme et son fils dans leur belle maison jaune d’un étage avec un grand jardin située avant l’embouchure de la Vaitepiha.

Mais, Maua’e devient tuberculeux et tout d’un coup sa vie s’écroule ! Il est placé a l’hôpital de Vaiami à Papeete, réuni avec d’autres tuberculeux dans un bâtiment situé du coté de la rue du four, bien isolé pour ne pas transmettre cette maladie aux autres malades. A cette époque on n’avait très peu de médicaments efficaces. La seule prescription était d’isoler le malade à Vaiami ou de l’envoyer aux Tuamotu.

Sa famille, femme et fils, frères et sœurs, cousins et autres, l’ont tous abandonné et ne sont jamais venus le voir. En plus ils ne lui ont pas adressé le moindre message. Ils l’ont laissé périr doucement dans la solitude. Tous sauf un, le jeune Talo, 10 ans, qui se souvenait avoir passé d’agréables vacances dans cette grande maison jaune de Tautira, et qui avait appris par hasard que son vieil oncle était enfermé dans l’hôpital. Il allait régulièrement lui apporter des fruits, des cigarettes ou lui donner un billet de 500 francs pour agrémenter l’ordinaire. L’ancien et l’enfant discutaient ensemble de tous les sujets, mais souvent le débat déviait sur sa famille qui l’avait abandonné. Un jour, n’en pouvant plus, il prononça ces mots terribles « ia pohe nae iau e haere iau e hauti i a vatou !» (Quand je serais mort, je me vengerais !). Quelques semaines plus tard, il décédait et on l’enterrait dans la cour de sa belle maison jaune.

L’histoire aurait du se terminer là, mais en fait, c’est maintenant qu’elle commença. Presque toutes les nuits les habitants de la maison et ceux de la famille étaient réveillés par des bruits de pas, de portes ou de fenêtres qui claquent. Ils sentaient comme une présence autour d’eux mais sans la voir. Mais les désagréments nocturnes prenaient des proportions de plus en plus importantes. La présence était plus proche et ils ressentaient même par moment son contact. Ils comprirent que c’était Maua’e, ou du moins un ‘aiaru ,un tupapa’u (fantôme) malveillant qui tenait sa parole en venant se venger. Un soir n’en pouvant plus, ils décidèrent de passer à l’acte. Armés de barre à mine et de pelle, ils ouvrirent le cercueil. Le corps de Maua’e était encore intact. Sa fille l’acheva d’un coup sur la nuque et suivant la recette que l’on utilise pour faire perdre le mana (pouvoir) à un ti’i, ils aspergèrent le corps d’essence et y mirent le feu. Son corps fut brulé, seule une jambe restait et pendant les nuits suivantes on pouvait entendre des pas dans la maison. La famille décidé d’en finir, appela un tahua (prêtre) pour venir chasser ce démon et les manifestations s’arrêtèrent.

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Sources :

Talo Pambrum et Olivier Babin – Avril 2010
Ahitua avril 2010