André Japy est pionnier de l’aviation française que certains compare à Lindbergh qui est venu s’installer en 1946 à Tahiti ou il convoyait le courrier vers les Tuamotu, un peu comme Jacques Brel le faisait aux îles Marquises.

Sur les vieilles cartes de Fakahina, figure au nord-Est de l’atoll une étrange inscription « Piste d’atterrissage Japy (inondable) ». Il s’agit d’une zone bien plane sur le platier, recouverte d’eau lors des grandes marées, qui servait de piste d’atterrissage pour le petit avion d’André Japy, qui apportait le courrier.

André Japy, le Lindbergh français

André Japy était un ingénieur, né en 1904 fils d’un fabriquant de machines à écrire de renommée internationale. Il était extrêmement méticuleux, un navigateur hors pair et jamais bien mesurer les risques.

  • Le 21 août 1935, il effectue dans la journée le trajet Paris-Oslo et retour (14 heures et 45 minutes de vol pour 2.880 km)
  • Le 16 Décembre 1935, il réalise avec son monoplan Caudron Aiglon de 100 chevaux un vol Paris- Saigon en 87 heures 30 minutes à la vitesse moyenne de 102.50 km/h et s’accapare ainsi du record de vitesse sur la liaison Paris_Saïgon, soit une distance de 12 000 kilomètres.
  • Le 6 août 1936, il relie Paris à Moscou en 16 heures et 5 minutes avec escales.
André Japy .Photo Guillelmon

André Japy et la Polynésie – Le Jacques Brel de l’époque

Au début de 1946, André Japy est affectée à la station météorologiste du Mont Faiere à Papeete, où il travaillera quelques années. Une fois libéré de ses occupations administratives, Japy, qui s’est installé à Punaauia, va d’abord s’occuper d’élevage. Il a acheté des terrains, – une soixantaine d’hectares – sur le plateau de Taravao, et passera plusieurs années à les débrousser pour y créer des pâturages. Il y place du bétail de race, des Hereford qu’il va chercher en Nouvelle-Zélande. Un peu plus tard, c’est sa femme qui va créer à Taravao un élevage de poules, appelé à devenir la première ferme d’œufs du territoire. Elle est partie de 18 poules de race Rhode-Islands, venant de France. Elle effectue des croisements, sélectionne, cherche des nourritures appropriées et en deux ou trois ans finit par obtenir d’excellents résultats.

Mais si André Japy s’intéresse à la culture, il a également apporté avec lui la nostalgie de l’aviation des années trente, avec la presque totale liberté des airs, l’absence des réglementations draconiennes, le climat de sympathie et de coopération qui unissait les aviateurs. Aussi, dès l’ouverture de la piste de Faa’a en 1960, il achète un Piper Super Cub avec un moteur de 150 chevaux Lycoming.

André Japy quitte Punaauia pour s’installer dans une superbe propriété qui domine la baie de Vairao. Il est là plus près de son domaine de Taravao où, en échangeant quelques parcelles avec l’évêque Paul Mazé dont le séminaire de Mitirapa est proche, il va créer « sa » piste d’atterrissage, une bande en herbe de 500 mètres sur 30 mètres de large.

La piste Japy de Fakahina

Plan de la piste d'atterrissage Japy à Fakahina

Plan de la piste Japy de Fakahina

Ancienne piste d'atterrissage Japy à Fakahina © Tahiti Heritage

La piste Japy de Fakahina

Avec son Piper, il effectue un vol et se pose à Anaa sur une surface aménagée sur un motu situé à l’Ouest du motu du village. Il effectue ensuite un vol vers Fakahina et se pose sur la plage côté lagon, sur une piste tellement bien faite par la population que des avions militaires bien plus lourds pouvaient l’utiliser. Sa popularité était grande car il transportait régulièrement de la nourriture ou des malades entre ces îles et Tahiti.

La distance de Tahiti est de 550 miles nautiques ce qui représente environ 6 heures de vol avec cet appareil. Il n’a aucun moyen de navigation et navigue uniquement à l’estime, au cap et à la montre. Cependant, il peut mieux préciser sa position en faisant des visées sur le soleil avec un sextant à bulle en fin de trajet. En effet, au départ de Tahiti, il fait systématiquement une route vers la droite de son point de destination pour être sûr avant l’arrivée d’avoir l’île sur la gauche, ou l’inverse, selon la position qu’occupera le soleil à l’heure de son arrivée.

La traversée Tahiti/îles de Pâques/Santiago

Quelque temps après, toujours avec le même avion équipé de réservoirs supplémentaires qui lui donnent une autonomie maximum, il fait un vol vers Nouméa qu’il atteindra sans problème. André Japy remplace son avion par un Cherokee 4 avec lequel il tente la traversée Tahiti/îles de Pâques/Santiago. En route, en pleine nuit et pratiquement à la verticale des îles Gambier, il observe une perte de puissance du moteur. Il décide alors de faire demi-tour et atterrit sans encombre à Moruroa. Le filtre à air du moteur s’était partiellement colmaté avec la pluie subie pendant le vol qui avait fait une sorte de pâte de boue avec la terre et la poussière qui étaient projetés sur son appareil au parking juste derrière le stationnement des DC4 au moment du démarrage de leurs moteurs. Le filtre a été remplacé à Moruroa et le Cherokee est rentré sans problème à Tahiti. Le raid n’a plus été tenté.


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Sources :

Jean Gillot, Le temps des pionniers Manureva n°109 sept 2006 p 16
O’Reilly Patrick, Tahiti et l’aviation – Société des Océanistes . André Japy p 115-123
Wings over Tahiti, Société des océanistes dossier 18 p 23